La Cour de Justice impose à la Commission d’appliquer à son personnel les principes de base du droit social européen et les dispositions de la Charte des droits fondamentaux de l’Union !

Un pas décisif pour mettre fin à la double vérité et à la politique du « fais ce que je dis, mais pas ce que je fais ! »

Ce jour, la Cour vient de rendre un arrêt d’une importance historique qui constitue une étape décisive pour mettre fin à l’approche « fais ce que je dis, mais pas ce que je fais ! »

La position de R&D 

Depuis toujours, R&D a réclamé que la Commission mette fin à son approche quelque peu schizophrénique et respecte enfin dans sa politique du personnel les principes de base du droit social européen tels que consacrés par la Charte des droits fondamentaux ainsi que les garanties offertes aux autres travailleurs par les Directives européennes. C’est exactement ce que la Cour vient de rappeler à notre institution.

La Commission a toujours prétendu que les directives sont adressées aux États membres et non aux institutions de l’Union et que leurs dispositions ne sauraient, par conséquent, être considérées comme lui imposant les mêmes obligations vis-à-vis de leur personnel.

Ainsi, le personnel se voyait privé des droits et des garanties que les institutions de l’UE avaient imposées aux Etats membres pour les travailleurs européens.

Pour R&D, la question n’a jamais été de méconnaître la situation parfois dramatique des travailleurs en Europe ou de nier que les conditions offertes par notre Statut – même si largement dégradées après 2004 – restent assez favorables pour le personnel permanent. Mais ceci n’est pas le cas pour nos collègues AC et encore moins pour nos collègues Agents Locaux.

Pour R&D, la question a depuis toujours été l’exigence pour les institutions de rester crédibles et notamment pour la Commission en tant que gardienne des Traités de mettre fin à l’approche « fais ce que je dis, mais pas ce que je fais »

Au cours des années, cette dichotomie a produit des situations plus qu’aberrantes qui ont vu notre institution reprocher parfois de manière très sévère aux Etats membres  – ceci jusqu’à les traîner devant la Cour – les pratiques qu’elle-même appliquait pourtant à son personnel !

L’arrêt de la Cour

La Cour agissant en réexamen de l’arrêt du TPI T-268/11P dans le contexte de ses missions visant à garantir l’unité et la cohérence du droit de l’Union vient de mettre fin à cette hypocrisie et reconnaît enfin au personnel des institutions l’application des principes du droit social européen !

En particulier, dans le cadre de cette affaire, un fonctionnaire s’était plaint de la décision de la Commission de refuser sur base de l’article 4 de l’annexe V du statut sa demande de report au-delà des 12 jours des congés non pris en raison, notamment, de sa maladie professionnelle.

Force est, à ce sujet, de rappeler que R&D a toujours dénoncé qu’il n’était pas digne de priver les collègues absents à cause d’une maladie de longue durée de la possibilité de reporter leurs congés annuels au-delà des 12 jours alors qu’ils étaient dans l’impossibilité d’en profiter à cause de leur maladie.

Or, dans le cadre de son action, la Cour, annule la décision du TPI en tant qu’instance d’appel et condamne la Commission en lui imposant de respecter l’article 7 de la directive 2003/88 reconnaissant le droit au congé annuel payé de chaque travailleur en tant que principe du droit social de l’Union revêtant une importance particulière désormais expressément consacré à l’article 31, paragraphe 2, de la Charte des droits fondamentaux.

La Cour rappelle que, selon un principe général d’interprétation, un acte de l’Union et donc aussi notre Statut doit être interprété, dans la mesure du possible, d’une manière qui ne remette pas en cause sa validité et sa conformité avec l’ensemble du droit primaire et, notamment, avec les dispositions de la Charte.

Ainsi, la Cour confirme que le droit à congé annuel payé implique, notamment, que tout travailleur ayant été privé de la possibilité de l’exercer en raison d’un congé de maladie de longue durée puisse bénéficier d’un report de ce droit, sans réduction de celui-ci, et à raison d’une période de report dont la durée doit dépasser substantiellement la durée de la période de référence pour laquelle elle est accordée, sans que les considérations tirées de la nécessité d’éviter le cumul de congés non pris de manière illimitée puissent y faire obstacle.

De même, les considérations tirées de la nécessité de protéger les intérêts financiers de l’Union ne sauraient, en tout état de cause, être invoquées pour justifier une atteinte au dit droit au congé annuel payé. La Commission ne peut donc pas priver un collègue absent pour maladie de longue durée de son droit de reporter l’ensemble de ses jours de congés.

R&D demande à la Commission de tirer sans délai toutes les conséquences de cet arrêt et en particulier :

– de corriger les règles en matière de reports de congés reprises sous le point III.e de la décision de la Commission du 5.11.2010 ;

de revoir les décisions de ne pas accepter un report de congé annuel prises depuis l’arrêt annulé dans des situations comparables à celle à la base de cet arrêt.

R&D ne manquera pas de prendre en compte les principes reconnus par la Cour dans cet arrêt dans le cadre de son action de négociation et de ses actions juridiques pour la défense des droits des collègues.